Songon, 04 fév 2025 (AIP)- Dans une interview accordée le samedi 1er février 2025 à l’Agence ivoirienne de presse (AIP), le président de la Banque alimentaire de Côte d’Ivoire (BACI), Maître Kignaman Soro, a souligné sa vocation de lutter contre la faim et la précarité alimentaire au pays. Il aborde les défis rencontrés par l’organisation dans la lutte contre la faim en Côte d’Ivoire et présente les projets de la BACI pour l’avenir.
AIP : Bonjour Maître Soro. La Banque alimentaire de Côte d’Ivoire est de plus en plus présente sur le terrain. Pouvez-vous nous expliquer son fonctionnement ?
Maître Kignaman Soro: La Banque alimentaire de Côte d’Ivoire (BACI) est une organisation à but non lucratif qui lutte contre la faim et le gaspillage alimentaire en collectant des denrées auprès de divers partenaires (supermarchés, entreprises, producteurs agricoles, particuliers) pour les redistribuer aux personnes en situation de précarité. Nos missions principales sont la collecte et la redistribution de denrées alimentaires, la sensibilisation sur la sécurité alimentaire et le gaspillage, ainsi que l’accompagnement des structures sociales partenaires.
AIP : Comment la Banque alimentaire collecte-t-elle les denrées alimentaires ?
K.S : Nous collectons des denrées via plusieurs canaux: les dons des supermarchés et producteurs, les collectes nationales organisées dans les grandes surfaces avec des bénévoles, ainsi que les dons en nature de certaines entreprises. La dernière collecte nationale, qui s’est déroulée en novembre 2024, a permis de recueillir plus de 12,6 tonnes de denrées, notamment du riz, des pâtes, de l’huile, du lait en poudre, des haricots, des produits d’hygiène et sanitaires etc. redistribuées ensuite aux associations partenaires. L’événement qui s’est tenue sur trois jours a mobilisé plusieurs acteurs économiques, une quarantaine de supermarchés partenaires et plus de 350 bénévoles engagés.
AIP : Quels sont les différents types d’organisations et de personnes que vous aidez ?
K.S : Nous soutenons des associations locales, des orphelinats, des centres pour personnes en situation de handicap, des cantines scolaires, ainsi que des foyers d’accueil pour femmes, personnes âgées et enfants en difficulté. Notre aide bénéficie principalement aux familles vulnérables, aux enfants en situation de malnutrition et aux personnes âgées isolées.
AIP : Comment assurez-vous la qualité et la sécurité des aliments que vous distribuez ?
K.S: Nous suivons des protocoles stricts de contrôle des denrées. Toutes les collectes sont triées par nos bénévoles afin de vérifier les dates de péremption et l’état des emballages. De plus, nous développons actuellement une chaîne du froid pour mieux stocker et distribuer les produits frais et surgelés.
AIP : Quel est l’impact de la Banque Alimentaire sur la lutte contre la faim et la malnutrition en Côte d’Ivoire ?
K.S: Chaque année, nous aidons plusieurs milliers de personnes à accéder à une alimentation plus stable et équilibrée. Nos actions permettent aussi de réduire le gaspillage alimentaire en redistribuant des produits qui auraient pu être jetés alors qu’ils sont encore consommables. Depuis le début des opérations en 2020, ces sont plus de 700 tonnes de denrées et produits essentiels collectés et redistribués à plus de 222 700 personnes donc 60% sont des enfants. Cette réalisation a été possible grâce à la contribution de nos bénévoles et par le biais de notre réseau associatif qui regroupe une Quarantaine d’associations, de centres, de foyers, de cantines.
AIP : Quels sont les principaux défis auxquels vous êtes confrontés dans votre travail ?
K.S: Le premier défi est logistique. Nous avons besoin de renforcer nos capacités de transport, de stockage et de distribution. Ensuite, la collecte des denrées est parfois irrégulière, ce qui complique la planification de nos distributions. Enfin, il nous faut constamment sensibiliser et mobiliser les entreprises et le grand public pour garantir un approvisionnement constant.
AIP : Comment la Banque alimentaire s’adapte-t-elle aux changements sociaux et économiques ?
K.S : Nous ajustons nos actions en fonction des besoins sur le terrain. Par exemple, avec l’augmentation du coût de la vie, nous avons renforcé nos partenariats avec des grandes surfaces et les entreprises agroalimentaires pour récupérer leurs surplus. Nous travaillons aussi à digitaliser nos processus afin d’améliorer la gestion des dons et des bénéficiaires.
AIP : Avec quels partenaires travaillez-vous pour atteindre vos objectifs ?
K.S: Nous collaborons avec des enseignes de distribution comme Carrefour et Auchan (partenaires conventionnels), et Prosuma Super U Marcory (nos partenaires sur les collectes nationales), des entreprises comme Danone, Scb, Friesland Campina, Les Centaures Routiers etc. Des associations engagées telles que L’association Partage et Passerel, ainsi qu’avec des ONG et institutions internationales comme le Global FoodBanking Network (GFN). Nous recevons aussi l’appui de bénévoles et de mécènes privés.
AIP : Comment financez-vous vos activités ?
K.S: Nos ressources proviennent de dons financiers d’entreprises et de particuliers, de subventions d’institutions, ainsi que du soutien de partenaires logistiques qui nous aident à réduire nos coûts opérationnels.
AIP : Quelles sont les initiatives que vous mettez en place pour sensibiliser la population à la lutte contre la faim ?
K.S: Nous organisons des campagnes de sensibilisation dans les écoles, des événements comme la Collecte Nationale, et participons à des initiatives internationales comme Food for Change. Nous impliquons aussi les jeunes à travers des programmes de bénévolat scolaire.
AIP : Quels sont vos projets pour l’avenir de la Banque alimentaire de Côte d’Ivoire ?
K.S: Nous souhaitons développer un programme de récupération des surplus agricoles, renforcer notre chaîne du froid et mettre en place des points de collecte fixes pour faciliter le don alimentaire. L’extension de notre réseau de bénéficiaires et de partenaires est aussi une priorité.
AIP : Comment voyez-vous l’évolution de la lutte contre la faim dans les années à venir ?
K.S: Avec l’implication croissante du secteur privé et des citoyens, nous espérons une meilleure structuration de l’aide alimentaire. L’enjeu sera aussi d’améliorer la production locale et de mieux gérer les excédents pour éviter les pertes et le gaspillage.
AIP : Avez-vous un message à transmettre aux personnes qui souhaitent s’engager dans la lutte contre la faim ?
K.S: Chaque geste compte. Que ce soit en donnant des denrées, en devenant bénévole ou en sensibilisant autour de vous, vous pouvez contribuer à cette cause essentielle. Ensemble, nous pouvons faire reculer la faim en Côte d’Ivoire.
(AIP)
(Interview réalisée par Tanguy Gahié)
tg/krk/cmas