Abidjan, 16 fév 2025 (AIP) – Quelque 175 associations issues du Bénin, de Côte d’Ivoire, du Niger, du Burkina Faso, du Sénégal et du Mali ont appelé les leaders africains à adopter sans délai la convention sur l’élimination de la violence à l’égard des femmes et des filles, en marge de la 38ᵉ session ordinaire de la Conférence des chefs d’État et de gouvernement de l’Union africaine qui se tient samedi 15 et dimanche 16 février 2025 à Addis-Abeba (Éthiopie), pour débattre des priorités continentales.
Ensemble pour mettre fin aux violences à l’égard des femmes et des filles en Afrique
Cette convention souligne la nécessité d’une approche intersectionnelle qui reconnaît les inégalités systémiques affectant les femmes et les filles, tout en réaffirmant le principe fondamental que les femmes et les filles africaines ont le droit de vivre à l’abri de toute forme de violence.
Une crise persistante qui exige une action courageuse
En Afrique, une femme sur trois subit des violences basées sur le genre au cours de sa vie, qu’il s’agisse de violences physiques, sexuelles, émotionnelles ou économiques. Ces violences, enracinées dans des inégalités structurelles et perpétuées par des normes patriarcales, affectent démesurément les femmes et les filles en situation de vulnérabilité (déplacées, réfugiées, femmes en situation de handicap ou issues de groupes marginalisés, etc.), selon le Réseau alliance droits et santé porteur du message au sommet de l’Union africaine.
A titre d’exemple, au Bénin, 69 % des femmes ont déclaré avoir subi des violences au moins une fois dans leur vie, tandis que 86 % ont été victimes de violences verbales ou psychologiques. Au Burkina Faso, 44 % des femmes ont été mariées avant l’âge de 18 ans, et plus de 9 800 cas de violences basées sur le genre ont été signalés en 2021. Au Niger, le mariage d’enfants demeure une pratique courante, car près de 25 % des femmes étaient déjà mariées avant l’âge de 15 ans.
Enfin, en Côte d’Ivoire, le Programme national de lutte contre les VBG faisait état de 8 782 cas de VBG rapportés et pris en charge en 2023, dont 1 067 cas de viols, 6 717 cas de violences domestiques et 154 cas de VBG sur les personnes en situation de handicap. Ces données illustrent l’ampleur de la crise et l’urgence d’une réponse coordonnée.
Un moment décisif pour l’Afrique
L’adoption de cette convention au Sommet de l’Union africaine marquera, selon les associations, l’engagement collectif des nations africaines à faire de la lutte contre les violences sexistes et sexuelles une priorité absolue, en alignant leurs politiques nationales sur les principes énoncés. En garantissant des services accessibles et centrés sur les survivantes, cette convention répond aux besoins et droits fondamentaux des femmes africaines, trop souvent ignorés ou minimisés. Cette convention reconnaît également la notion de féminicide (meurtre d’une femme ou d’une fille en raison de son genre) comme un enjeu de vocabulaire majeur qui permet de lutter contre l’invisibilisation des violences sexistes, et ainsi d’apporter une reconnaissance juridique et des solutions plus adaptées.
L’un des points phares de cette convention est la proposition de mise en place du Comité africain pour la fin de la violence à l’égard des femmes et des filles. Ce comité jouerait un rôle central dans la coordination, le suivi et l’évaluation des engagements des États membres. En étant un organe dédié à la surveillance de l’application des dispositions de la Convention, il assurerait une responsabilisation accrue des gouvernements, tout en favorisant la participation active des organisations de la société civile et des mouvements féministes. Ce mécanisme garantirait une réponse durable et effective aux violences sexistes et sexuelles à travers le continent.
Un appel à l’action collective
Le Réseau alliance droits et santé et ses partenaires, dans le cadre de leur plaidoyer régional, appellent les leaders africains à adopter et à ratifier sans tarder cette convention qui serait un engagement à lutter contre l’impunité des auteurs, des lois renforcées, des budgets alloués, des mécanismes de suivi efficaces, et une volonté politique constante.
« Nous appelons également les mouvements de femmes, les organisations de la société civile et les activistes à maintenir la pression. Ce combat est le nôtre, et il ne prendra fin que lorsque chaque femme et chaque fille, dans chaque coin du continent, pourra vivre en sécurité et dans la dignité”, soutient le Réseau qui estime que l’avenir de l’Afrique repose sur la capacité de ses nations à protéger leurs citoyennes et citoyens les plus vulnérables.
(AIP)
Tls/kp