Abidjan, 14 mars 2025 (AIP)- Le mois de mars 2025 marque une période singulière pour de nombreux couples mixtes en Côte d’Ivoire. Avec le début du ramadan le 1er mars et du carême chrétien le 5 mars, ces foyers interreligieux vivent un temps de partage, d’adaptation et de respect mutuel. Rencontre avec trois couples à Yopougon et Koumassi, dans la ville d’Abidjan, qui, au-delà des différences de foi, tissent leur harmonie conjugale.
Un respect mutuel des pratiques
Chrétien pratiquant, Christian d’Abblé suit avec ferveur le carême, marqué par la prière, la privation et l’introspection. Son épouse Fatim Sidibé, musulmane, observe quant à elle le jeûne du ramadan avec assiduité. Loin de vivre ces moments en parallèle, ils ont trouvé un équilibre.
« Chaque année, je fais le ramadan avec ma femme », confie Christian. « Je ne bois ni ne mange en journée, et j’attends la rupture du jeûne avec elle, même lorsque je suis à l’extérieur. C’est une période où nous prions ensemble plus souvent qu’à l’accoutumée. »
Fatim, de son côté, accompagne son mari dans sa démarche spirituelle. « Je prépare des repas plus simples, on évite les sorties tardives, et je l’encourage », dit-elle. « Je ne vais pas souvent à l’église, mais il m’arrive de l’accompagner à certaines célébrations. »
“Je suis là pour ça” : Abiba et Sié, 10 ans de vie commune
Niebié Abiba, catholique, et son mari Sié Ouattara, musulman, vivent à Koumassi leur différence religieuse avec simplicité et pragmatisme.
« Ça se passe bien, il n’y a pas de problème », affirme Abiba. « Mon mari jeûne, moi je fais à manger. Je fais aussi mon carême. Il n’y a pas d’obligation de manger ensemble à une heure précise, donc je fais de mon mieux. »
Avec dix ans de mariage, ils ont trouvé leur rythme. « Je me lève à 4 heures du matin pour lui préparer son repas avant le début du jeûne. Il mange, fait sa prière et après, on travaille », raconte-t-elle.
Le soir, elle veille à ce qu’il ait un bon repas. « Parfois, il rentre tard, mais ce n’est pas un souci. Un jour, je fais du thiep, un autre du kabato, du plakali, du soulang ou du foutou. Je varie les plats, comme une femme musulmane le ferait pour son mari. »
Au-delà de la cuisine, il y a le soutien spirituel. « Je le soutiens dans la prière, et lui aussi. Chacun fait sa part, et ça marche bien. »
Cissoko et Esther : une union sous le signe du dialogue
Depuis six ans, Cissoko Abdoul et Mireille Koffi, un couple de Yopougon, construisent leur foyer sur la base du respect et du dialogue. Abdoul, musulman, et Mireille, protestante, ont appris à conjuguer leurs croyances sans heurts.
« Ce n’est pas toujours évident au début, surtout avec nos familles respectives », confie Abdoul. « Mais avec le temps, nous avons prouvé que notre amour était plus fort que nos différences. »
Mireille abonde dans le même sens. « Pendant le carême, Abdoul m’accompagne parfois au temple, et durant le ramadan, je me joins à lui pour la rupture du jeûne. Ce sont des gestes simples, mais qui comptent énormément », souligne-t-elle.
Le couple a aussi instauré des moments d’échange. « On discute beaucoup de spiritualité, sans chercher à convaincre l’autre, mais pour mieux se comprendre », explique Abdoul. « C’est une richesse d’avoir ces deux héritages. »
Une transmission ouverte aux enfants
Fatim et Christian, tout comme Abiba et Sié, ont à cœur de ne pas imposer un choix religieux à leurs enfants.
« Nos enfants grandissent avec ces deux traditions et pourront décider plus tard », explique Fatim habitant à Koumassi. « Ils nous suivent au temple comme à la mosquée, ils fêtent autant Pâques que l’Aïd. »
Chez Malik et Esther, cette ouverture est aussi une évidence. « Nous voulons qu’ils comprennent nos deux fois et qu’ils puissent choisir leur propre chemin, en toute liberté », affirme Esther.
Entre respect des croyances et harmonie conjugale, ces couples prouvent que l’amour peut transcender les différences religieuses, et que foi et tolérance se conjuguent au quotidien.
(AIP)
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