Par Simon Benjamin Bassole coll : Dorine Gbalou et Binta Soumahoro
Abidjan, 16 mars 2025 (AIP)- En cette période de carême chrétien et de ramadan musulman, les salles de gymnastique en Côte d’Ivoire traversent une phase de ralentissement marquée par une baisse significative de fréquentation. Face à cette réalité, les promoteurs rivalisent d’ingéniosité pour proposer des formules adaptées, tandis que les médecins du sport prodiguent des conseils avisés pour concilier jeûne et activité physique en toute sécurité.
Une ambiance inhabituelle à Koumassi
À l’entrée de la commune de Koumassi, une salle de gym se dresse fièrement au carrefour Jelti, un point névralgique où se croisent commerçants, taxis et passants.
Les klaxons des véhicules et les appels des vendeurs ambulants créent une symphonie urbaine. Pourtant, à l’intérieur de la salle, l’ambiance contraste avec l’agitation extérieure. Ce vendredi 14 mars 2025, les lieux, d’ordinaire bondés en fin de journée, semblent désertés. Les haltères reposent silencieusement sur leurs supports, et les tapis de course tournent au ralenti.
« Depuis trois jours avant le ramadan, on observe un net ralentissement. Beaucoup de clients ont suspendu leurs séances pour se préparer au jeûne », explique Bamba Arouna, coach sportif, témoin habitué de cette transformation saisonnière.

En temps normal, la salle accueille jusqu’à 28 personnes en soirée. Aujourd’hui, elles ne sont plus qu’une poignée, oscillant entre 6 et 8.
« Certains évoquent la difficulté de concilier prières et séances de sport, tandis que d’autres préfèrent éviter les efforts physiques intenses », poursuit-il.
À Yopougon, le gymnase Ohara n’échappe pas à cette tendance. Habituellement fréquenté par plus de 50 clients, il n’en accueille plus qu’une trentaine depuis le début du carême et du ramadan.
« Avant cette période, nous réalisions facilement un bénéfice de 70 000 FCFA. Aujourd’hui, il est difficile de rentrer avec 30 000 FCFA », déplore Maurel, gérant du gymnase.
Un défi pour les promoteurs
Cédric, promoteur d’une salle de gym située près de la nouvelle gare, exprime son inquiétude face à l’impact de cette période sur son activité.
« Le carême et le ramadan sont des moments de privation et de recueillement pour nos clients chrétiens et musulmans. Certains réduisent leur activité physique, d’autres suspendent temporairement leur abonnement. À Bingerville, où les deux communautés sont bien représentées, cette double baisse de fréquentation affecte sérieusement notre chiffre d’affaires », confie-t-il.
Pour faire face à cette situation, des solutions innovantes sont mises en place. Pour les clients musulmans, les horaires sont étendus en soirée, après la rupture du jeûne, avec des activités plus douces comme le stretching. Pour les chrétiens, des programmes d’entraînement plus courts mais intenses sont proposés, permettant de maintenir une activité physique sans perturber leur engagement spirituel.
Sensibilisation et initiatives sociales
Le directeur général d’Ivoire Agora, Siribé Yves Ismaila souligne que la période du jeûne est un moment de réveil spirituel et de solidarité.

« Nous encourageons la pratique du sport pendant cette période. Nous avons instauré une réduction de 50 % pour inciter à la pratique du sport féminin. Par ailleurs, nous multiplions les activités sociales en collaboration avec des ONG et des associations, organisant des séances de fitness suivies de moments de partage », explique-t-il.
Cette période est également propice au lancement de la ligue Verticale, une initiative visant à promouvoir le sport comme vecteur d’épanouissement et de santé.
Les conseils d’un médecin du sport
Dans un entretien avec le magazine « Tam-tam », Dr Mohamed Lakiss, médecin du sport, rassure quant à la compatibilité du jeûne avec l’activité physique.
« Le jeûne ne réduit pas le rendement des athlètes. Il n’est pas un frein à leur performance sur le terrain », affirme-t-il.
Il recommande aux sportifs musulmans de bien s’alimenter aux deux principaux repas, à savoir le matin avant l’aube et le soir à la rupture du jeûne. Une hydratation suffisante, avec au moins un litre et demi d’eau par repas, est essentielle pour éviter crampes, déchirures et blessures.
Dr Lakiss insiste également sur l’importance d’un sommeil réparateur, conseillant aux sportifs de dormir entre 21 heures et 2 heures du matin.
« Un vertige, un tremblement ou des sueurs froides indiquent que le cerveau n’est plus suffisamment perfusé. Au moindre malaise, il faut arrêter l’effort pour éviter un accident vasculaire cérébral ou un arrêt cardiaque. , met-il en garde.
En cas de besoin, le sportif peut consommer deux ou trois dattes et un peu d’eau pendant les pauses pour reprendre des forces. Ces précautions sont d’autant plus cruciales dans un climat tropical ou il fait très chaud.
(AIP)
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