Abidjan, 19 mai 2025 (AIP) – Le Réseau ouest-africain des activistes et des avocats de la défense des médias (WANAMDEL) exprime sa « vive inquiétude » face aux formulations « vagues » et aux dispositions « potentiellement liberticides » d’un projet de loi antiterroriste récemment introduit par le gouvernement sierra-léonais, qui pourraient, selon lui, criminaliser l’expression civique pacifique, le journalisme indépendant et les actions des défenseurs des droits humains.
WANAMDEL, qui regroupe 14 avocats de toute l’Afrique de l’Ouest, craint que le projet de loi, en l’état, ne serve de prétexte pour réprimer la dissidence et restreindre l’espace démocratique sous couvert de lutte contre le terrorisme. Le texte introduit notamment des notions floues comme « intimidation du public » ou « atteinte à la sécurité publique », sans définir clairement les frontières entre activités terroristes et participation civique légitime.
« Une telle ambiguïté ouvre la voie à des abus contre les journalistes d’investigation, les manifestants pacifiques, les lanceurs d’alerte ou encore les universitaires engagés », avertit le réseau. Les articles 12, 15 et 21 du projet sont jugés particulièrement préoccupants, car ils n’offrent pas de garanties suffisantes pour les acteurs de la société civile.
WANAMDEL souligne que le texte entre en contradiction avec la Constitution sierra-léonaise de 1991, qui garantit la liberté d’expression. Il contrevient également aux standards internationaux et régionaux en matière de droits humains, notamment les articles 19 et 25 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques (PIDCP), l’article 9 de la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples, et la Déclaration de principes sur la liberté d’expression en Afrique (2019).
L’absence de contrôle judiciaire, la responsabilité pénale stricte sans preuve d’intention, ainsi que la sévérité des sanctions prévues, comme l’emprisonnement à vie, sont également dénoncées par le réseau, qui y voit « des menaces graves pour la gouvernance démocratique dans un pays où les institutions restent fragiles. »
WANAMDEL appelle, face à ces dérives potentielles, le gouvernement sierra-léonais à réviser profondément le projet de loi pour en restreindre la portée, introduire des garanties explicites pour les acteurs civiques, et aligner le texte avec les obligations internationales de la Sierra Leone.
« La sécurité ne doit pas être un alibi pour bâillonner les voix citoyennes », conclut le réseau, qui réaffirme son engagement en faveur d’une gouvernance respectueuse des droits humains en Afrique de l’Ouest.
(AIP)
kp