Abidjan, 4 juin 2025 (AIP) – Le célèbre écrivain et metteur en scène Abass Zein offre une nouvelle respiration au théâtre ivoirien avec une audacieuse adaptation de la pièce “L’Avare” de Molière, qui sera jouée ce jeudi 5 juin 2025 à l’Institut français d’Abidjan.
Invité mardi 03 juin 2025 à Abidjan-Plateau par le Club HEC arts et culture, Abass Zein est revenu avec verve sur son amour du théâtre, sa passion pour la transmission et sa vision d’un art dramatique ancré dans les réalités africaines. Cet entretien a rassemblé amateurs de théâtre, cinéastes, passionnés de culture et plusieurs personnalités du monde artistique.
Entre nouchi, alexandrins et satire sociale, cette version originale s’annonce comme un moment de théâtre haut en couleur, alliant patrimoine littéraire classique et saveur contemporaine ivoirienne.
Une adaptation singulière de “L’Avare”
Dans cette relecture ivoirienne, Harpagon, personnage avare et manipulateur, conserve son obsession pour l’argent, mais dans un décor qui pourrait bien évoquer les rues d’Abidjan. L’intrigue reste fidèle à la trame originale : Harpagon souhaite marier ses deux enfants et se remarier lui-même – le tout le même jour, histoire de faire des économies. Problème : la femme qu’il convoite est aussi l’élue du cœur de son fils.
La langue de Molière, quant à elle, se pare ici d’intonations nouvelles. Le nouchi – cet argot urbain typiquement ivoirien – se mêle aux alexandrins classiques pour donner naissance à une œuvre hybride et savoureuse. Les comédiens ivoiriens, rompus à la scène, promettent un spectacle authentique, drôle et touchant, où le public se reconnaîtra entre humour grinçant et critique sociale.
Un homme, une trajectoire, un amour du pays
Né à Dakar peu avant les indépendances africaines, Abass Zein grandit à Abidjan, plus précisément dans le quartier populaire de Treichville. Scolarisé à l’école Saint Jean-Bosco, il poursuit son parcours jusqu’au lycée classique, avant de rejoindre la faculté de médecine. Mais le théâtre, lui, n’a jamais quitté son esprit.
« C’est à Yamoussoukro que l’idée m’est venue de faire du théâtre pour rapprocher les communautés qui cohabitaient sans se fréquenter », a-t-il confié. C’est ainsi qu’il écrit « Toubabou Story », sa toute première pièce, suivie d’autres œuvres remarquées.
Médecin de formation, dramaturge par passion, Abass Zein est aujourd’hui chevalier des arts et des lettres en France. Il se veut le témoin d’un théâtre qui rassemble, bouscule et interroge. Ses adaptations, comme celle de “Soundjata Keita” en opéra, témoignent de sa volonté de fusionner les héritages, de décloisonner la culture et d’éveiller les consciences.
Quand l’art devient une entreprise culturelle
Au cours de son échange avec le public, Abass Zein a aussi partagé sa réflexion sur la place de l’art dans l’économie créative ivoirienne. Pour lui, le théâtre ne peut plus être envisagé uniquement comme une activité intellectuelle ou de loisir. Il doit devenir un vecteur de développement, un moteur d’inclusion et d’innovation. « Il faut penser la culture comme une entreprise qui crée de la valeur, de l’emploi et du lien social », a-t-il plaidé.
Un patriotisme de cœur et d’engagement
Malgré ses origines orientales, Abass Zein ne cesse de clamer son attachement profond à la Côte d’Ivoire. Pour lui, l’amour d’un pays ne se mesure pas à la couleur de peau ou aux racines généalogiques. C’est un engagement de chaque jour, une volonté d’agir et de transmettre. Son œuvre en est la plus éclatante démonstration.
Ce jeudi 5 juin, le public abidjanais est donc convié à redécouvrir “L’Avare”, non plus comme une vieille comédie classique, mais comme un miroir vif de notre société, teinté de poésie et d’audace.
(AIP)
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