samedi, novembre 15

Bouna, 15 nov 2025 (AIP) – Les 11 et 13 novembre 2025, huit groupes d’action communautaire (GAC) et quatre Espaces amis des femmes (EAF) du Bounkani ont transformé leur vécu de victimes en moteur d’engagement collectif contre les mutilations génitales féminines (MGF) et les violences basées sur le genre, à l’occasion d’un atelier de formation qui a eu pour cadre les salles du district sanitaire de Bouna et à Doropo.

Pendant deux jours de formation, ces femmes, mères, jeunes filles, survivantes, ont appris à mettre des mots sur des pratiques longtemps tues. Elles ont analysé les conséquences des MGF telles que douleurs chroniques, complications obstétricales, traumatismes psychologiques, et surtout, le poids du silence imposé par les traditions.

« Cette formation vise à autonomiser les femmes pour qu’elles s’approprient le problème, mettent fin au silence et élèvent leurs filles dans un environnement plus sûr », a expliqué le chef du bureau régional de Caritas Côte d’Ivoire dans le Bounkani, Bleu Narcisse. Selon lui, comprendre que les MGF ne sont pas une fatalité culturelle mais une violation des droits humains constitue la première étape vers le changement.

Au-delà de la sensibilisation, les participantes ont été formées à des compétences pratiques comme identifier une fillette exposée au risque d’excision, connaître les recours légaux et orienter les survivantes vers les soins médicaux et l’accompagnement psychologique.

Les groupes d’action communautaire, considérés comme des acteurs clés de proximité, ont également été outillés en techniques de dialogue intergénérationnel, un élément essentiel dans une région où les croyances liées aux MGF se transmettent depuis des générations.

« Les MGF et les violences faites aux femmes et aux filles constituent une violation grave des droits fondamentaux, une forme de discrimination basée sur le sexe et une source de souffrance physique et psychologique », a rappelé M. Bleu. Il a souligné que l’implication des communautés demeure indispensable, car ni les lois ni les programmes nationaux ne suffisent si les populations ne se sentent pas elles-mêmes actrices du changement.

Le Projet Muskoka pour la santé de la femme et de l’enfant mise sur une stratégie participative, à savoir les femmes formées deviennent des relais communautaires, des médiatrices et des protectrices au sein de leurs villages. Cette initiative, mise en œuvre par Caritas Côte d’Ivoire avec l’appui d’ONU-Femmes, s’inscrit dans un partenariat avec les ministères en charge de la Santé, de la Protection sociale et de la Femme, de la Famille et de l’Enfant. Elle illustre la nécessité d’une approche multisectorielle face à des pratiques profondément enracinées.

La volonté de « briser les tabous et encourager le dialogue » constitue le pilier central de l’intervention. Dans de nombreuses familles, l’excision demeure perçue comme une obligation culturelle. Des grand-mères perpétuent ce qu’elles ont subi, des mères y voient une protection pour l’avenir marital de leurs filles et la communauté sanctionne les écarts à la norme.

Le pari est de faire des femmes longtemps réduites au silence les porte-voix d’une génération nouvelle. Dans le Bounkani, le changement s’enracine désormais dans ces cercles de parole, ces GAC et ces espaces où les femmes osent dire « non » et envisager un avenir sans violences pour leurs filles.

(AIP)

On/kp

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