mercredi, novembre 26

Enquête réalisée par Dogad Dogoui, AIP Gagnoa

Gagnoa, 04 oct 2025 (AIP) – L’initiative gouvernementale « Électricité pour tous », visant à la généralisation de l’accès à l’électricité à l’horizon 2025, change progressivement le quotidien des ménages ruraux, notamment d’Oumé. En facilitant l’installation de compteurs à cartes par un apport initial de 1000 FCFA, le programme contribue à réduire la fraude sur l’électricité et, dans certaines localités d’Oumé, il redéfinit le rôle économique des femmes, devenues de véritables piliers familiaux face au recul de la production cacaoyère.

Un projet contre la fraude, pour l’accès équitable

La Compagnie ivoirienne d’électricité (CIE) estime à plusieurs dizaines de milliards de francs CFA les pertes dues à la fraude du courant. Le programme « Électricité pour tous » propose un branchement officiel avec paiement échelonné du coût réel (170 000 FCFA sur dix ans), après un premier versement de 1000 FCFA. Cette mesure réduit les branchements clandestins et sécurise l’approvisionnement en électricité des foyers et petits commerces.

Dans les villages de Zaddi, Bokéda (sous-préfecture de Tonla) et de Gouéda (sous-préfecture de Diégonéfla), plus de 500 ménages bénéficient déjà de ce type de compteurs. « Partout, c’était l’euphorie », témoigne Belam, un jeune relais communautaire de Zaddi.

Des femmes autonomisées par l’électricité

Pour de nombreuses commerçantes, disposer d’un compteur individuel a marqué un tournant. Vendeuse de jus à Gouéda, Hélène raconte qu’elle dépendait auparavant des caprices du propriétaire du compteur traditionnel. Ses activités étaient régulièrement interrompues pour de petites factures impayées. « Avec mon compteur à 1000 FCFA, je gère moi-même ma consommation et mon commerce est stable », se réjouit-elle.

Même constat chez Laurentine, à Zaddi, qui alimente chaque semaine son compteur de 2000 FCFA. Elle affirme que ses bénéfices journaliers sont passés d’environ 600 FCFA à plus de 2500 FCFA, grâce à la régularité de son approvisionnement. « Mon congélateur n’a plus jamais été débranché », dit-elle, soulignant la fin d’un système où seuls certains hommes, dont des instituteurs, bénéficiaient d’un accès permanent à l’électricité.

À Bokéda, Bla Eulalie confirme l’impact. Après avoir acquis son compteur en janvier 2024, elle note une hausse significative de ses revenus et annonce fièrement avoir ouvert un compte d’épargne. À Gouéda, Valentine, vendeuse de poissons et de viande, explique que l’accès autonome à l’électricité lui permet désormais de conserver ses produits sans dépendre des grossistes, notamment les hommes, producteurs de cacao qui font face depuis quelques années à la maladie du cacao. Le Swollen Shoot fragilise leurs revenus agricoles.

À Zaddi, le chef du village, Koffi Valia, observe que les plantations locales sont décimées depuis 2020, réduisant considérablement les récoltes et les revenus des producteurs. Cette situation renforce le rôle économique des femmes, dont les activités commerciales, appuyées par un accès autonome à l’électricité, assurent désormais la survie des foyers.

« Avant, ma femme contribuait ponctuellement. Aujourd’hui, c’est elle qui couvre toutes les dépenses, y compris la scolarité des enfants », reconnaît Laurent Gongoua, producteur de cacao dont le fruit de son travail est passé de 25 sacs à seulement trois.

Vers une transformation sociale durable ?

Pour certaines autorités traditionnelles et des producteurs, les femmes assument de plus en plus la responsabilité économique du ménage. « Celui qui tient la bourse, tient les rênes », résume le chef du village de Zaddi.

Si le programme « Électricité pour tous » favorise l’autonomisation des femmes et contribue à réduire la fraude, parviendra-t-il à l’éradiquer totalement, alors que certaines zones rurales attendent encore leur raccordement ?

(AIP)

Dd/kp

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