Abidjan, 14 oct 2025 (AIP) – L’Organisation mondiale de la Santé (OMS) tire une nouvelle fois la sonnette d’alarme face à l’augmentation rapide de la résistance aux antibiotiques, devenue une menace majeure pour la santé mondiale.
Selon un rapport publié lundi 13 octobre 2025, une infection bactérienne sur six dans le monde résiste désormais aux traitements courants, compromettant l’efficacité des soins et mettant en péril les progrès médicaux récents.
« La résistance aux antimicrobiens va plus vite que les progrès de la médecine moderne et menace la santé des familles dans le monde entier », a averti le Directeur général de l’OMS, Dr Tedros Adhanom Ghebreyesus.
L’agence onusienne estime que la résistance bactérienne a été directement responsable de 1,27 million de décès en 2019, et a contribué à près de cinq millions d’autres à l’échelle mondiale. Sans action urgente, les experts craignent des pertes économiques estimées à 3.000 milliards de dollars de produit intérieur brut (PIB) par an d’ici 2030.
Basé sur les données recueillies dans plus de 100 pays via le Système mondial de surveillance de la résistance aux antimicrobiens et de leur usage (GLASS), le rapport révèle que la résistance a augmenté dans plus de 40 % des associations entre agents pathogènes et antibiotiques entre 2018 et 2023, avec une progression annuelle moyenne de 5 à 15 %.
La résistance atteint des niveaux particulièrement élevés en Asie du Sud-Est et dans la région de la Méditerranée orientale, où une infection sur trois signalée est résistante, contre une sur cinq en Afrique. Ces disparités s’expliquent notamment par la faiblesse des systèmes de santé et le manque d’accès à des outils de diagnostic fiables dans plusieurs pays.
Le rapport évalue la prévalence de la résistance à 22 antibiotiques utilisés contre diverses infections – urinaires, gastro-intestinales, sanguines ou sexuellement transmissibles – et surveille huit bactéries pathogènes majeures, dont Escherichia coli, Klebsiella pneumoniae, Acinetobacter spp. et Staphylococcus aureus.
Les bactéries dites à Gram négatif, particulièrement difficiles à éradiquer, représentent la plus grande menace. E. coli et K. pneumoniae, deux agents majeurs d’infections du sang, montrent des taux de résistance alarmants aux céphalosporines de troisième génération : plus de 40 % pour E. coli et 55 % pour K. pneumoniae, avec des taux dépassant parfois 70 % en Afrique.
D’autres antibiotiques essentiels, tels que les carbapénèmes et les fluoroquinolones, perdent également de leur efficacité, poussant les praticiens à recourir à des médicaments de dernier recours, souvent coûteux et difficiles d’accès dans les pays à revenu faible ou intermédiaire.
L’OMS déplore que, malgré la participation croissante au GLASS – passée de 25 pays en 2016 à 104 en 2023 – près de la moitié des États membres n’aient pas transmis de données en 2024. Or, les pays les plus touchés par la résistance antimicrobienne sont souvent ceux qui disposent du moins de moyens pour la surveiller et y faire face.
« Notre avenir dépend du renforcement des systèmes de prévention, de diagnostic et de traitement », a déclaré le Dr Tedros, appelant à investir dans le développement d’antibiotiques de nouvelle génération, de tests moléculaires rapides et dans une utilisation plus responsable des traitements existants.
(AIP)
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