Abidjan, 28 sep 2025 (AIP) – La rage reste l’une des zoonoses les plus meurtrières en Côte d’Ivoire, avec quelque 500 décès notifiés chaque année, dont la majorité touche les enfants de moins de 15 ans. Selon une étude de 2018, en moyenne 637 personnes mourraient annuellement de cette maladie dans le pays, des chiffres qui traduisent une situation plus grave que celle officiellement rapportée. Pourtant, cette affection, transmise dans 99% des cas par des chiens infectés, est mortelle à 100% chez l’homme mais évitable à 100% par la vaccination.
Au niveau mondial, la rage cause 59 000 décès par an, soit une vie perdue toutes les neuf minutes. En Côte d’Ivoire, environ 48 000 personnes sont mordues chaque année, mais seules 14 000 consultent un centre de santé.
Des chiffres alarmants à Abobo
La commune d’Abobo, choisie pour abriter la Journée mondiale de lutte contre la rage (JMLR) 2025, le mardi 30 septembre, est l’une des zones les plus touchées. Cette année, entre janvier et juillet, 877 personnes exposées ont été prises en charge par l’antenne communale de l’INHP, dont 600 à Abobo-Est et 277 à Abobo-Ouest. Dans le même temps, plusieurs cas de rage animale ont été signalés, et trois décès humains ont été enregistrés de 2020 à 2024 dans ces deux districts sanitaires.
Cette situation illustre l’urgence de renforcer les campagnes de prévention, notamment la vaccination de masse des chiens, qui demeure l’arme la plus efficace pour interrompre la transmission.
Une stratégie intégrée « Une seule santé »
Le gouvernement ivoirien, sous l’impulsion du Président Alassane Ouattara, a adopté en 2018 un plan national intégré de lutte contre la rage, basé sur quatre piliers : la vaccination des animaux, la gestion des chiens errants, la sensibilisation communautaire, et la prise en charge rapide des personnes exposées.

Depuis lors, plus de 600 000 chiens ont été vaccinés et 5 000 personnes prises en charge gratuitement. En 2024, une avancée majeure a été réalisée avec l’adoption du protocole intradermique recommandé par l’OMS, qui réduit la vaccination humaine de 28 à sept jours et fait baisser le coût de 48 000 à 12 000 FCFA. Avec l’appui de GAVI, l’Alliance du vaccin, l’objectif est d’atteindre la gratuité totale d’ici 2026, rappelle la déclaration conjointe publiée le 28 septembre 2025 par le ministre des Ressources animales et halieutiques, Sidi Tiémoko Touré, et son homologue en charge de la Santé, de l’Hygiène publique et de la Couverture maladie universelle, Pierre N’Gou Dimba.
Le défi de la couverture canine
Pour éliminer la rage d’ici 2030, la Côte d’Ivoire doit vacciner 70% de sa population canine estimée à 1,5 million d’individus, soit un million de chiens par an. Or, la couverture vaccinale actuelle est d’à peine 12%, un retard préoccupant.
Le fardeau économique est également considérable : la rage entraîne des pertes évaluées à 20 milliards FCFA par an, en raison des coûts de soins et des impacts socio-économiques. Le budget nécessaire pour l’élimination sur dix ans est estimé à 18 milliards FCFA, soit 1,8 milliard par an.
Les médias et les communautés, acteurs clés
Conscients que « les populations victimes de rage le sont par ignorance », selon le directeur des services vétérinaires et du bien-être animal (DSVBA), Dr Kallo Vessaly, les autorités misent sur une forte implication des journalistes. Ces derniers ont été formés le 26 septembre 2025 à Abidjan pour renforcer leurs capacités en communication des risques et relayer les messages de prévention.
La Journée mondiale de lutte contre la rage, qui sera officiellement célébrée le 30 septembre à Abobo, sera l’occasion de mobiliser les leaders communautaires, les écoles, les autorités locales et les populations autour du thème national « Tous ensemble, agissons pour zéro mort de rage en Côte d’Ivoire ». Une marche d’enfants et une vaste campagne de vaccination gratuite de 20 000 chiens et chats marqueront l’événement.
Un appel à l’action
La rage est une maladie qui ne laisse aucune seconde chance. Chaque morsure ou griffure suspecte doit conduire immédiatement à un lavage à l’eau et au savon pendant 15 minutes, suivi d’une consultation dans un centre de santé.
Atteindre l’objectif « zéro décès de rage d’ici 2030 » exige la mobilisation de tous: propriétaires d’animaux, pour assurer la vaccination régulière de leurs chiens et chats; leaders communautaires, pour sensibiliser et orienter les victimes vers les structures sanitaires; médias, pour relayer l’information à grande échelle; et citoyens, pour adopter les bons réflexes en cas d’exposition.
Une maladie mortelle mais évitable
La rage peut être éradiquée si chacun joue sa part. Ensemble, la Côte d’Ivoire peut tourner définitivement la page de cette maladie évitable mais encore trop meurtrière.
(AIP)
cmas