Zuénoula, 26 nov 2025 (AIP) – Le fleuve Youhou (Bandama), témoin éternel de l’évolution de Zuénoula, voit aujourd’hui se dresser un pont moderne en remplacement de l’ouvrage colonial, longtemps considéré comme l’un des symboles architecturaux de la localité.
Au-delà de la modernisation infrastructurelle, cette transition est aussi l’occasion de revisiter l’histoire du canton Zuénou grâce à des acteurs locaux engagés, dont maître Mathurin Bi Zou, cadre et fils de Zuénoula, reconnu pour sa profonde connaissance du patrimoine Gouro.
Témoin de l’époque coloniale, le premier pont a été imaginé sous le magistère du Commandant Amelé Charles, sous-préfet de Zuénoula de 1953 à 1955. Le projet prendra corps sous les administrations de Patris André (1955-1957) et de Faget Paul (1957-1960), permettant l’avènement de l’ouvrage qui facilitera durant des décennies les échanges locaux et les liaisons avec la métropole.
Selon maître Bi Zou dont les recherches personnelles et les archives familiales éclairent souvent l’histoire du canton, ce pont n’a pas seulement servi d’infrastructure économique. « Il a relié des familles, soutenu des activités agricoles, permis la cohésion entre les tribus et accompagné le développement du peuple gouro », rappelle-t-il, insistant sur le rôle vital qu’a joué l’ouvrage dans la structuration des territoires Bouénou, Gornou, Gnranagon, Tchanou et Mangourou.
Mais, confronté à l’usure du temps et à ses limites, notamment lors des crues spectaculaires du Youhou – comme celle de septembre 2018 – le pont colonial ne répondait plus aux exigences de sécurité. En réponse, l’État ivoirien a entrepris la construction d’un nouvel ouvrage, plus résistant, mis en service en 2024.
Le nouveau pont assure aujourd’hui une connexion stratégique entre Zuénoula et Vavoua (56 km), Daloa (78 km) ainsi que Sucrivoire, ex-SODESUCRE (25 km). Il permet aussi de valoriser les zones traversées : vers Vavoua, les territoires Bouénou – notamment Béziaka – et Gnranagon ; vers Daloa, d’autres villages Bouénou ainsi que les tribus Gornou, Tchanou et Mangourou.
Pour Mathurin Bi Zou, cet ouvrage moderne ne rompt pas avec le passé : il le prolonge. « Le pont représente désormais un passage entre deux époques : celle de nos aînés qui ont connu les débuts du canton Zuénou, et celle d’aujourd’hui tournée vers le développement. C’est un élément essentiel de notre mémoire collective gouro », souligne-t-il.
Les populations de Yizi, situées derrière le Bandama, expriment également leur satisfaction de voir leur accessibilité améliorée, consolidant leur intégration à l’ensemble du département.
Entre modernité et héritage, Zuénoula affirme ainsi son identité, portée par ses infrastructures et par des voix engagées comme celle de Me Mathurin Bi Zou, farouche défenseur de la culture gouro.
(Par Amani Kouakou Robert, AIP Zuénoula)
(AIP)
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