À partir de 1990, sous la pression des mouvements démocratiques africains et internationaux, le multipartisme légal s'installe en Côte d'Ivoire. Cette ouverture voit naître de nouveaux partis politiques qui osent défier l'hégémonie du PDCI et présenter leurs propres candidats présidentiels. Parmi ces nouveaux acteurs, Laurent Gbagbo, déjà visible sur la scène politique depuis les années 1980, émerge comme une figure majeure de l'opposition. Les premières élections pluralistes marquent l'apparition d'une véritable concurrence politique, bien que les héritiers du système houphouëtiste conservent encore un avantage considérable.
En 1995, la présidentielle ivoirienne s’est tenue dans un climat de forte tension, marqué par l’introduction du concept d’« ivoirité » qui a exclu la candidature d’Alassane Ouattara (RDR). Face à ce qu’ils considéraient comme une élection verrouillée au profit du président sortant Henri Konan Bédié, le RDR et le FPI de Laurent Gbagbo ont choisi non pas un simple retrait, mais un boycott actif du scrutin.
Cette stratégie s’est traduite par des appels à la désobéissance civique, des campagnes de sensibilisation et des manifestations visant à délégitimer le processus électoral. Bédié a été réélu avec plus de 95 % des voix, mais dans un contexte d’abstention massive et de contestation, ce qui a fragilisé la crédibilité du scrutin et accentué la polarisation politique en Côte d’Ivoire.
En Côte d’Ivoire, le 24 décembre 1999, un coup d’État militaire met brutalement fin au régime d’Henri Konan Bédié. Confronté à une crise politique et sociale alimentée par la contestation du concept d’« ivoirité », par la montée des frustrations sociales et par les tensions autour de l’exclusion de certains acteurs politiques, Bédié est renversé par un groupe de militaires conduit par le général Robert Guéï, ancien chef d’état-major limogé quelques mois plus tôt. Cet événement, premier putsch de l’histoire ivoirienne depuis l’indépendance, marque une rupture majeure dans la tradition de stabilité héritée de Félix Houphouët-Boigny.
L’arrivée au pouvoir du général Guéï interrompt le processus démocratique en cours et ouvre une période d’incertitude. Bien qu’il se présente comme un « sauveur » venu restaurer l’ordre et la justice, son régime militaire ne parvient pas à instaurer la stabilité durablement. Cette prise de pouvoir consacre l’entrée de l’armée dans l’arène politique et installe une dynamique de défiance entre les institutions, les partis politiques et la société civile, prélude aux crises successives que le pays connaîtra dans les années 2000.
Malgré des résultats provisoires donnant Guéï vainqueur, la mobilisation populaire l’oblige à céder le pouvoir. Laurent Gbagbo est proclamé élu avec environ 59 %.
Début de la présidence de Gbagbo dans un climat de forte tension, marqué par la frustration des exclus et la persistance de divisions politiques profondes.
2002 : Rébellion et partition du pays
Le déclenchement de la rébellion armée dans la nuit du 18 au 19 septembre 2002, qui a divisé la Côte d’Ivoire entre un Sud contrôlé par le gouvernement et un Nord tenu par les Forces nouvelles, a profondément perturbé le calendrier politique national.
Initialement prévue pour octobre 2005, l’élection présidentielle n’a pu se tenir en raison de l’occupation du Nord, des difficultés liées à l’identification des électeurs et des conditions sécuritaires jugées précaires. Malgré les accords de Marcoussis (2003) et les médiations internationales, l’absence de consensus entre le président Laurent Gbagbo, les rebelles et l’opposition a conduit la communauté internationale à entériner le report du scrutin, prolongeant ainsi le mandat présidentiel au-delà de son terme constitutionnel.
Avec un taux de participation historique de près de 83 %, la présidentielle de 2010 a marqué l’espoir d’un retour à la paix après huit années de crise. Trois poids lourds s’affrontaient : Laurent Gbagbo, Alassane Ouattara et Henri Konan Bédié.
Le premier tour plaça Gbagbo en tête (38 %), devant Ouattara (32 %) et Bédié (25 %). L’alliance entre ce dernier et Ouattara fit basculer le second tour, la CEI donnant Ouattara vainqueur avec 54 %. Mais le Conseil constitutionnel proclama Gbagbo élu, ouvrant une grave crise postélectorale qui fit plus de 3 000 morts.
En avril 2011, Ouattara fut reconnu président. Cette élection reste celle de la plus forte mobilisation citoyenne de l’histoire du pays, mais aussi du désenchantement démocratique.
L’élection présidentielle de 2015, première après la crise postélectorale de 2010-2011, s’est tenue dans un climat de stabilisation mais sur fond de divisions politiques. Huit candidats ont été retenus, dont Alassane Ouattara (RHDP) et Pascal Affi N’Guessan (FPI), tandis qu’une partie de l’opposition réunie au sein de la Coalition nationale pour le changement (CNC) a boycotté le scrutin, dénonçant des conditions jugées inéquitables.
Le vote s’est déroulé globalement dans le calme, avec une participation de 52,86 %. La CEI a proclamé la victoire d’Alassane Ouattara dès le premier tour avec 83,7 % des voix, contre un peu plus de 9 % pour Affi N’Guessan. Ce résultat, validé par le Conseil constitutionnel et reconnu à l’international, a renforcé le pouvoir présidentiel, mais a révélé une opposition affaiblie et divisée.
L’élection présidentielle du 31 octobre 2020 s’est tenue dans un climat explosif, marqué par le décès du dauphin désigné, Amadou Gon Coulibaly, et la candidature controversée d’Alassane Ouattara pour un troisième mandat. Face à lui figuraient Henri Konan Bédié (PDCI-RDA), Pascal Affi N’Guessan (FPI) et l’indépendant Konan Kouadio Bertin (KKB), seul à refuser le boycott prôné par l’opposition.
Ouattara a été réélu dès le premier tour avec 94,27 % des voix, contre 1,99 % pour KKB, dans un contexte de faible participation. Le scrutin a été émaillé de violences préélectorales et postélectorales qui ont fait plusieurs dizaines de morts, ravivant le spectre des crises passées.
L’élection présidentielle en Côte d’Ivoire est prévue pour le 25 octobre 2025. Sur les 60 dossiers de candidature reçus par la Commission électorale indépendante (CEI), cinq ont été retenus par le Conseil constitutionnel à l’issue de son examen, le 8 septembre 2025.
Ce sont MM.
Ce scrutin, qui marque une étape importante du calendrier républicain, s’inscrit dans un contexte de consolidation démocratique, de renouvellement de la classe politique et de recherche de cohésion nationale. La diversité des profils retenus témoigne de la pluralité des sensibilités représentées dans le paysage politique actuel.
Copyright 2025. Agence Ivoirienne de Presse (AIP). Tous droits reservées AIP