Abidjan, 24 mars 2025 (AIP) – Jean-Patrick Ehouman (JPE) est un ingénieur informaticien et architecte logiciel, spécialisé dans les technologies de pointe, notamment l’intelligence artificielle (IA). Entrepreneur engagé, il se consacre à la formation des populations pour une meilleure compréhension et utilisation de l’IA.
Dans cette interview accordée à l’Agence Ivoirienne de Presse (AIP) le 18 mars 2025, il revient sur l’impact de cette technologie sur le monde du travail et insiste sur l’importance de l’adaptation aux nouvelles réalités numériques.
AIP : L’intelligence artificielle s’impose dans tous les secteurs. Peut-on légitimement craindre la disparition de certains métiers ?
JPE : Plutôt que de parler de disparition, il serait plus juste d’évoquer une transformation des métiers, notamment ceux qui reposent sur le traitement de données. Les secteurs bancaires, financiers et assurantiels sont directement impactés car l’IA permet une analyse rapide et précise, facilitant ainsi la prise de décisions. Loin d’être une menace, elle constitue un outil d’optimisation et d’efficacité pour les professionnels.
AIP : Vous suggérez donc une évolution dans la manière d’exercer ces professions…
JPE : Absolument ! L’IA ne remplace pas l’humain, elle devient un allié. Ceux qui sauront l’exploiter efficacement gagneront en productivité et en pertinence dans leur travail. L’objectif est d’utiliser cette technologie pour enrichir nos compétences et améliorer notre performance au quotidien.
AIP : Comment un professionnel peut-il rester utile face à l’essor de l’intelligence artificielle ?
JPE : La clé réside dans la formation. Un journaliste ou un communicant, par exemple, peut apprendre à utiliser l’intelligence artificielle pour automatiser la veille médiatique. J’ai eu le cas d’un responsable communication qui, grâce à l’IA, réalise aujourd’hui des revues de presse complètes en quelques minutes, là où il fallait auparavant plusieurs heures de lecture et de tri manuel.
AIP : Vous insistez sur le rôle de l’IA comme un collaborateur privilégié. Pouvez-vous illustrer cela ?
JPE : Si nous restons toujours dans le cas d’un responsable communication qui paramètre une intelligence artificielle pour effectuer une synthèse quotidienne de l’actualité pertinente à 7h30. En quelques minutes, il obtient un résumé des informations clés issues de centaines de sources. Cela lui permet de se concentrer sur l’analyse et la stratégie au lieu de perdre du temps dans la collecte brute d’informations. L’IA n’est donc pas un substitut, mais un assistant précieux.
AIP : Peut-on dire que l’intelligence artificielle est adaptable à tous les métiers ?
JPE : Oui. Même les secrétaires, par exemple, peuvent utiliser l’IA pour optimiser la gestion des rendez-vous, automatiser certaines réponses ou classer les documents. En adoptant l’intelligence artificielle, elles renforcent leur valeur ajoutée au sein de l’entreprise.
AIP : Y a-t-il des métiers émergents grâce à l’IA ?
JPE : Oui, notamment celui de Prompt Engineer ou ingénieur de requête. Ce spécialiste conçoit des instructions précises pour obtenir des résultats optimaux de l’IA. Un bon Prompt Engineer doit structurer ses demandes en fonction du contexte, des contraintes et de l’objectif recherché. Ce rôle est appelé à se généraliser.
AIP : Qu’en est-il des risques éthiques et de sécurité, associés à l’intelligence artificielle ?
JPE : L’utilisation de l’IA soulève des enjeux majeurs, notamment en matière de protection des données. Beaucoup d’entreprises partagent involontairement des informations sensibles avec ces outils, sans contrôler leur destination ni leur utilisation. Il est primordial de lire attentivement les conditions d’utilisation et d’anonymiser les données confidentielles avant de les soumettre à une intelligence artificielle.
AIP : Pouvez-vous donner un exemple concret des dérives possibles ?
JPE : L’IA peut être exploitée à des fins malveillantes. Il est aujourd’hui possible de recréer une identité numérique ou de manipuler des images et vidéos pour duper l’opinion. Il existe déjà des cas d’extorsion où des individus se retrouvent accusés à tort sur la base de deepfake qui est un enregistrement vidéo ou audio réalisé ou modifié grâce à l’intelligence artificielle. La vigilance est donc de mise.
AIP : Un message pour conclure ?
JPE : Je recommande à chacun d’apprendre à utiliser l’intelligence artificielle. Elle est déjà omniprésente dans nos vies. Savoir s’en servir est une nécessité pour rester pertinent dans un monde en mutation. Ne pas s’y intéresser, c’est prendre le risque d’être rapidement dépassé.
(Réalisée par Raymond Dibi)