Abidjan, 04 oct 2024 (AIP) – Les transformatrices de produits halieutiques de la ville de Sassandra ont récemment débuté l’expérimentation des “FAO-Thiaroye de Transformation (FTT)”, un projet piloté par l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) dans le cadre de son Initiative pêches côtières – Afrique de l’Ouest (IPC-AO).
« Cela fait trois semaines que les fours sont opérationnels. Ils nous apportent de nombreux bénéfices. Je viens d’Abidjan et j’ai payé 30 kg de poissons à fumer pour les acheminer vers Abidjan. Les femmes sont en train de le fumer et je repartirais avec le produit. C’est à la fois économique et rapide », a témoigné Aimé Flogo à l’AIP, le mardi 24 septembre 2024, plaidant pour une réduction du coût du kilogramme de poisson, qui s’élève actuellement à 200 FCFA.
Les trois fours, en service depuis le 2 septembre, sont gérés par des transformatrices professionnelles sélectionnées pour le fumage des poissons au sein du local.
Rokia Coulibaly, 32 ans, qui s’est engagée dans cette activité pour subvenir à ses besoins, se déclare fière de cette nouvelle technique de fumage qui présente de nombreux avantages. Il s’agit de la réduction des risques sanitaires, l’amélioration de la sécurité alimentaire et de la qualité des produits, la diminution de l’utilisation du bois de chauffe, l’amélioration des conditions de travail et la réduction des pertes alimentaires.
« Certains clients préfèrent le poisson fumé bien sec, d’autres le souhaitent moins sec. Nous fumons donc le produit en fonction de la demande. Si nous mettons le poisson le matin, il est prêt en début d’après-midi », précise-t-elle, ajoutant que plusieurs commandes sont destinées à l’exportation vers l’Europe.
Madeleine Tano Aka, mareyeuse avec 20 ans d’expérience, se réjouit du gain de temps, passant de 12 à 24 heures avec le four traditionnel à seulement trois à cinq heures par session.
« Avec les fours FTT de la FAO, l’exposition à la chaleur est considérablement réduite, tout comme les brûlures, la fumée et la consommation de combustible. Les opérations de fumage ne constituent plus un risque pour la santé de nos yeux ni pour notre système respiratoire », souligne-t-elle, rappelant également que ce gain de temps leur permet de consacrer davantage de moments à leur vie de famille.
L’engouement des fours gagne du terrain à Sassandra
La cheffe d’antenne du débarcadère de Sassandra, Justine Kouadio, a expliqué que cette nouvelle méthode de transformation permet de diminuer les pertes post-capture.
« Les fours traitent 1,5 tonne de poisson par jour dans des conditions optimales. Nous avons enregistré trois personnes par jour apportant leur poisson, et plus de 483 kilogrammes de produits ont été traités durant cette période, ce qui équivaut à 37,15 kg par jour », précise Mme Kouadio.
Elle ajoute que la fréquentation ne cesse d’augmenter, passant de huit personnes à la première semaine à 22 à la troisième. « Au début, les gens étaient sceptiques, mais l’enthousiasme des transformatrices grandit. C’est un projet pilote qui favorisera l’implantation d’autres fours dans la ville », assure-t-elle.
Le consultant de la FAO, Dr Jérémie Labla Diomandé, spécialiste des chaînes de valeurs des produits halieutiques, souligne qu’avec les fours FTT, la consommation de bois est réduite par cinq. « Pour fumer 1 kg de poisson dans les fours traditionnels, il faut 5 kg de bois, alors qu’ici, nous avons réussi à réduire à presque 1 kg de bois pour 1 kg de poisson », dit-il.
Ces fours FTT améliorent clairement les conditions de travail et de vie des mareyeuses de la ville. Estimées à environ 2 300, ces femmes transformatrices réalisent annuellement un chiffre d’affaires évalué à quatre milliards de Francs CFA.
La pêche à Sassandra, station balnéaire située dans le Sud-Ouest ivoirien, représente plus de 70 % des activités économiques, englobant environ 2 500 acteurs de la pêche et 2 300 femmes transformatrices.
De nouveaux défis
Sur ce littoral, cohabitent des pêcheurs ghanéens, libériens, ivoiriens et togolais. Les Ghanéens sont les plus nombreux, avec plus de 2 123 pêcheurs et 359 propriétaires de pirogues.
« Notre défi majeur est de garantir la disponibilité des produits à un coût abordable pour la population. L’autorité préfectorale nous a instruits de collaborer avec le ministère du Commerce afin de permettre aux habitants de Sassandra d’accéder aux ressources halieutiques », affirme Dr Raymond Taha, directeur régional des Ressources animales et halieutiques pour le Gbôklè, à Sassandra.
La secrétaire générale de la préfecture de Sassandra, Séraphine Djè Adjo Soro, a exprimé le souhait, avec le soutien de l’État ivoirien, de doter Sassandra d’un port de pêche afin de favoriser une plus grande production de produits halieutiques.
La ville de Sassandra génère environ 5,517 millions de tonnes de produits halieutiques, pour une valeur marchande supérieure à cinq milliards FCFA.
L’Initiative Pêche Côtière Afrique de l’Ouest est un projet qui vise à renforcer la gouvernance, la gestion et les chaînes de valeur de la pêche par la mise en œuvre d’une approche écosystémique des pêches, d’outils internationaux pertinents et de partenariats innovants en matière de gouvernance de la pêche. Il se propose, entre autres, de créer les conditions nécessaires pour l’amélioration de la compréhension et de la considération sur la façon dont les différents maillons de la chaine de valeur sont liés et contribuent à des pêcheries et des moyens d’existence durables au profit des acteurs.
(AIP)
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