Man, 15 avr 2025 (AIP)-Le Centre régional de transfusion sanguine (CRTS) de Man joue un rôle crucial dans l’approvisionnement en produits sanguins des régions du Bafing, Cavally, Guemon et Tonkpi. Dans un contexte de forte demande et de stocks alarmants, le directeur du centre, Dr Saffo Apia Bernard, a accordé, jeudi 10 avril 2025, une interview à l’AIP où il a fait l’état des lieux et alerté sur la situation critique actuelle, appelant à une mobilisation collective pour garantir la disponibilité du sang et sauver des vies.
Pouvez-vous nous présenter brièvement le Centre de transfusion sanguine de Man ?
Le Centre de transfusion sanguine est situé sur la route du lycée Dion Robert, sur l’ancien site des grandes endémies. Il a pour mission de collecter les produits sanguins, de les préparer et de les distribuer dans les quatre régions sous la responsabilité du Pôle régional d’excellence sanitaire (PRES) de Man à savoir, le Bafing, le Cavally, le Guemon et le Tonkpi.
Le centre dispose d’un dépôt relais dans chaque structure de soins de ces régions. Au total, ce sont 15 dépôts de sang qui sont régulièrement approvisionnés pour répondre à la demande. Pour la collecte, nous bénéficions de l’aide des autorités administratives et de la collaboration des responsables des structures de santé. Nous travaillons également avec les organisations de la société civile et les organisateurs de collectes volontaires.
Quelle est la situation actuelle des stocks de sang au Centre de transfusion sanguine de Man ?
Il est arrivé un moment où la production avait été plus ou moins acceptable. Mais ces temps-ci, la production est basse, très basse d’ailleurs, ce qui fait que les stocks sont pratiquement arrivés à épuisement. Mais nous essayons de relever la pente en vue de pouvoir satisfaire la demande. Aujourd’hui les besoins sont beaucoup plus importants au niveau du groupe 0. Pour les autres groupes (A, AB et B), les stocks disponibles à ce jour (jeudi 10 avril 2025) peuvent nous permettre de tenir maximum cette semaine (semaine du 7 au 13 avril). Et donc il y aura forcément une pression mais, on espère que les uns et les autres auront ce désir-là, de venir nous aider à augmenter le stock pour qu’on ait du sang disponible.
La rareté du sang est-elle un problème récurrent dans la région du Tonkpi ?
Oui, c’est un problème très récurrent. Mais la situation sera encore plus préoccupante étant donné que notre plus grande cible de donneurs que sont les élèves et étudiants iront très bientôt pour les vacances scolaires et universitaires. Mais pour pouvoir anticiper sur les risques de pénurie, nous nous attelons chaque fois à aller vers les communautés, chercher celles qui peuvent nous aider à prélever des produits sanguins. Nous avons approché également les autorités administratives et coutumières qui sont très ouverts et près à leur niveau à nous appuyer dans l’organisation de collecte de sang. Et nous espérons que d’ici peu les choses iront mieux.
Quelles sont les principales causes identifiées de la rareté du sang dans la région ?
Je dirais que l’une des causes qui peut expliquer cela car répétitive, c’est la pesanteur sociale et culturelle. Ce que j’ai constaté c’est que la population n’a pas encore compris le bien fondé du don de sang. Les gens ont encore des appréhensions de mon point vue à venir donner de leur sang. Il y a donc des efforts à faire à ce niveau-là en matière de sensibilisation et de promotion du don de sang dans la région afin d’espérer atteindre nos objectifs. Il y a aussi l’état de nos routes qui rentre en ligne de compte parce qu’il y a des populations qui désirent bien faire le don de sang, mais il nous est difficile de les atteindre parce que nous ne disposons pas d’engins adaptés à ces routes. Du coup, beaucoup de nos cibles restent inaccessibles.
Pour les populations accessibles, quelles mesures spécifiques sont mises en place pour les encourager à donner leur sang et garantir une collecte régulière et suffisante ?
Au-delà des dispositifs existants comme la journée mondiale du don de sang ou le rappel des donneurs déjà enregistrés pour leur rendez-vous de prélèvement, nous avons initié des partenariats avec les radios locales pour renforcer la sensibilisation. À Man, nous avons sollicité le roi, le préfet de région et d’autres autorités pour élaborer des stratégies efficaces. Dans cette optique, nous attendons élargir notre champ de collecte de sang en ne limitant plus nos actions seulement en ville mais partir vers les villages accessibles en associant à l’action, les chefs de communautés, les associations de jeunes et autres leaders locaux.
Comment la communauté locale pourrait-elle mieux contribuer à la gestion des besoins en sang dans la région ?
Le centre de transfusion sanguine est une banque particulière, car le sang est un produit périssable, avec une durée de vie de 42 jours. Vu que la demande est très forte dans la région, la communauté locale doit nous aider pour le renouvellement constant des stocks. Qu’elle nous épaule donc à faire véhiculer le message de la solidarité en produit sanguin auprès des populations, en faisant comprendre qu’aucune femme ne doit perdre la vie par qu’une tierce personne à refuser de donner son sang. Et nous comptons sur les autorités administratives pour nous permettre d’avoir accès à ces communautés et faire passer notre message, parce qu’il est important que tous s’impliquent véritablement car le sang ne viendra pas d’ailleurs.
Aujourd’hui, l’Etat de Côte d’Ivoire a fait des efforts en décentralisant au maximum ses structures et faire en sorte que chaque structure puisse être autosuffisante en produit sanguin dans sa localité. Faisons donc en sorte que le Centre régional de transfusion sanguine de Man qui prend en compte les régions du Bafing, du Cavally, du Guemon et du Tonkpi puisse avoir une disponibilité constante en produit sanguin.
(AIP)
ebd/fmo
Réalisée par Delphin EHUI Boa,
Chef du bureau régional de Man.