Bouaflé, 22 mai 2025 (AIP) – Une mission stratégique a été conduite dans le département de Bouaflé dans le cadre du projet PlanetGold, mis en œuvre par les ONG CASE et IMPACT, afin d’introduire une approche juridictionnelle et paysagère pour encadrer l’exploitation minière artisanale et à petite échelle (EMAPE)
Entamée le 9 mai 2025, cette mission a sillonné plusieurs localités du département, notamment Tibéita, Bégbessou, Angovia et Pakouabo.
Lors d’un atelier de restitution et d’échanges, réunissant, mardi 21 mai 2025 à Bouaflé, ONG, chercheurs, autorités locales et artisans miniers, le consultant indépendant Patrice Ebah, expert en industrie extractive et développement des territoires, est revenu sur les enjeux et ambitions de cette initiative.
Selon lui, cette action s’inscrit dans une dynamique régionale, en synergie avec une expérimentation similaire conduite à Siguiri en Guinée. L’objectif principal est d’apporter des solutions concrètes aux problématiques suivantes : élimination du mercure, accès au financement, formalisation de l’EMAPE et adoption de technologies durables.
Il a expliqué que l’approche juridictionnelle et paysagère vise à fédérer l’ensemble des parties prenantes d’un territoire autour d’une problématique commune notamment l’orpaillage artisanal. Elle permet une identification fine des impacts environnementaux, sociaux et économiques, en vue d’élaborer des mécanismes de gouvernance plus responsables et inclusifs.
Patrice Ebah a souligné que la première phase de la mission dite de cadrage, a permis une cartographie des acteurs locaux. Elle a révélé des activités d’extraction qui se déroulent à la fois sur terre ferme et dans les cours d’eau, ces dernières étant strictement interdites en Côte d’Ivoire, la destruction du couvert végétal, le rôle ambivalent des propriétaires terriens, parfois acteurs de la filière illégale, une crise de confiance envers l’autorité coutumière et une inquiétude grandissante liée à la menace sur les terres agricoles et à la sécurité alimentaire.
Des initiatives locales émergent notamment avec l’implication des sous-préfets dans la sensibilisation, ou encore des ONG environnementales engagées dans la réhabilitation de sites miniers dégradés.
L’un des leviers stratégiques envisagés est la structuration des communautés en coopératives minières villageoises, afin de formaliser une pratique ancestrale tout en garantissant des retombées économiques locales durables.
Contrairement à une logique d’interdiction, l’approche prônée vise à réguler avec rigueur et transparence l’exploitation de l’or, en distinguant clairement zones autorisées et zones interdites (notamment les cours d’eau), et en s’appuyant sur le cadre légal national.
Patrice Ebah a souligné également que le projet espère faire de Bouaflé un exemple pilote en matière de gouvernance minière durable avec l’appui des autorités locales (préfecture, conseil régional) et l’adhésion des communautés. « Si Bouaflé réussit, elle deviendra cette ‘ville lumière’, cette référence pour une gestion responsable de l’orpaillage en Afrique de l’Ouest », a-t-il déclaré.
Selon le coordonnateur du projet au Centre africain pour la santé environnementale au sein de l’ONG CASE, Kouamé Arthur, « l’ensemble des parties consultées ont exprimé un large consensus sur la pertinence de cette approche, qui crée un cadre de concertation locale essentiel à une gouvernance minière efficace et durable ».
Une seconde phase de la mission est prévue prochainement. Elle permettra aux consultants de poursuivre les échanges sur la base de données consolidées et de recommandations concrètes, en vue de produire un document de référence qui sera soumis aux autorités, pour instituer un cadre permanent de dialogue à Bouaflé.
Le projet PlanetGold Côte d’Ivoire, lancé en mars 2023 et financé par le Fonds pour l’environnement mondial (FEM) dans le cadre de l’initiative Minamata, vise à réduire, voire éliminer, l’usage du mercure dans l’orpaillage artisanal, tout en promouvant une exploitation aurifère responsable et durable.
(AIP)
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