Par Benjamin SORO
Abidjan, 25 oct 2024 (AIP)-À l’approche de la 4e édition du Salon des infrastructures d’Abidjan (SIA), Dr Kouassi Paulin, président du comité scientifique, partage les enjeux des technologies émergentes dans le secteur du bâtiment et des travaux publics (BTP). Cet événement, organisé par le Groupement ivoirien du bâtiment et des travaux publics (GIBTP) en collaboration avec Axes Marketing, se déroulera les 12, 13 et 14 novembre 2024 au parc des expositions d’Abidjan.
Quelle est la spécificité de cette 4e édition du SIA après six années d’interruption ?
Tout d’abord, je souhaite rappeler que cette édition se déroulera effectivement au parc des expositions d’Abidjan, dont la construction avait été vivement souhaitée par le GIBTP lors de l’édition de 2018, parrainée par le ministre de l’Équipement et de l’Entretien routier, Dr Amédé Kouakou, représenté par son collègue en charge de la Construction, du Logement et de l’Urbanisme, Bruno Nabagné Koné. À cette occasion, le ministre avait pris l’engagement de faire de la construction de ce parc une réalité. Le salon s’y tiendra effectivement, ce qui représente une avancée par rapport aux éditions précédentes où des chapiteaux devaient être dressés pour les expositions. Par ailleurs, il est important de noter que ce salon coïncide avec la célébration des 90 ans du GIBTP. Bien que le GIBTP ait prévu une célébration conjointe, celle-ci a été décalée.
Quels défis le salon doit-il relever ?
Les défis sont nombreux, surtout en ce qui concerne l’avenir du BTP. L’enjeu majeur est d’amener les entreprises, les bureaux d’études et les maîtres d’ouvrage à s’approprier les nouvelles technologies et méthodes de construction. Cela leur permettra de rester compétitifs tout en offrant des infrastructures durables et résilientes à leurs communautés. Nous espérons que ce salon incitera les professionnels à acquérir des compétences techniques avancées et à porter une attention particulière à l’impact carbone de leurs projets. Il est également crucial d’encourager les jeunes participants à se former et à s’engager dans des réseaux professionnels. Deux conférences inaugurales porteront sur le thème central de cette année : la première, animée par le BNETD, traitera des technologies émergentes, tandis que la seconde, présentée par l’entreprise COLAS, se concentrera sur les innovations dans le secteur routier.
Pourquoi avoir choisi le thème « Technologies émergentes et innovations dans l’industrie du BTP » ?
Le GIBTP a souhaité choisir un thème d’actualité susceptible d’intéresser toutes les entreprises. Il convient de rappeler le processus de détermination des thèmes : nous mettons l’accent sur les défis auxquels les acteurs sont confrontés. Nous proposons généralement cinq thèmes que le GIBTP soumet à toutes les entreprises. À l’issue de ce processus, les entreprises ont unanimement choisi le thème « Technologies émergentes et innovation dans l’industrie du BTP ». Ce choix illustre la volonté des entreprises ivoiriennes de tirer parti des innovations pour améliorer l’efficacité, la durabilité et la sécurité de leurs processus de construction. Aujourd’hui, les attentes croissantes de la population en termes de qualité et de durabilité des infrastructures livrées rendent cette démarche nécessaire. Les entreprises doivent être performantes pour répondre à ces exigences, tant au niveau national qu’international, surtout que nombre d’entre elles s’exportent déjà. Il est essentiel de ne pas rester en marge des technologies. En résumé, le choix de ce thème par le GIBTP répond à la nécessité pour notre pays d’éviter la fracture numérique en restant à l’écart des nouvelles technologies.
Quelles retombées ce thème aura-t-il pour le citoyen ?
Les questions d’innovation concernent tout le monde, tant les entreprises du BTP que le citoyen lambda. Par exemple, l’utilisation d’outils de communication tels que WhatsApp a permis à de nombreuses personnes, initialement réticentes, de réaliser les avantages de cette application pour la collaboration et le travail. Aujourd’hui, le citoyen lambda s’attend à des infrastructures durables. Les infrastructures, qu’elles soient construites avec des fonds publics ou des emprunts internationaux, doivent être réalisées avec soin pour satisfaire les populations, tout en optimisant l’utilisation des ressources. De plus, les nouvelles technologies permettent aux entreprises de mieux surveiller leurs chantiers. Les citoyens peuvent désormais suivre la qualité des travaux et alerter les décideurs via des plateformes ou journaux en ligne, leur conférant un droit de regard sur la qualité des infrastructures.
Pensez-vous qu’il est temps de rompre avec les vieilles pratiques pour adopter les technologies émergentes ?
Il ne s’agit pas de rompre avec le passé, mais plutôt de saisir les opportunités offertes par les nouvelles technologies. Par exemple, avec les plateformes de communication, il est désormais possible d’assister à des réunions de chantier à distance, ce qui optimise l’efficacité et la transparence des rapports. Les technologies émergentes offrent la possibilité d’améliorer la véracité des informations échangées, ce qui est essentiel pour éviter des désillusions. Ne pas adopter ces innovations dans un monde interconnecté reviendrait à se priver d’outils essentiels pour le développement.
La jeunesse est un maillon essentiel. Comment peut-elle bénéficier de ces innovations pour se positionner ?
J’invite les jeunes à participer massivement à ce salon. C’est une occasion unique d’interagir avec les maîtres d’ouvrage, les maîtres d’œuvre et les entreprises, de s’informer sur les évolutions dans divers secteurs d’activités dans le BTP, tels que le bâtiment, les routes, ou encore l’hydraulique. Ce salon leur permettra d’identifier des opportunités et de nouer des contacts précieux. De plus, il est crucial que les jeunes adoptent une démarche d’apprentissage continu. La recherche d’emploi peut être facilitée par des rencontres en direct lors de l’événement, comme cela a été le cas pour de nombreux jeunes qui ont réussi à décrocher des stages et des emplois grâce à leur présence au salon. Certains m’ont déjà fait part de leur expérience.
Nous sommes à quelques jours du salon. Quelles sont les dispositions prises et combien de visiteurs sont attendus ?
Comme lors des éditions précédentes, le comité d’organisation prévoit environ 5 000 visiteurs. Pour cette édition, le comité a souhaité inclure des participants de toute la sous-région, et des démarches sont entreprises en ce sens. Ce salon représente une occasion précieuse pour les acteurs de la sous-région de se rencontrer et d’échanger. De nombreux acteurs institutionnels seront également présents, bien que nous ne puissions pas encore confirmer leurs noms. L’événement sera ouvert à de nombreux acteurs venant d’Europe et d’autres régions du monde, offrant ainsi aux Africains l’opportunité de s’imprégner des pratiques innovantes dans le secteur du BTP.
Quels ont été les impacts des précédentes éditions sur le secteur du BTP en Côte d’Ivoire ?
Les éditions précédentes ont entraîné des avancées notables en Côte d’Ivoire. L’édition de 2014, par exemple, a permis d’exposer des produits innovants qui ont été appliqués sur le boulevard lagunaire grâce à l’entreprise Colas. Suite à cette édition, l’État a décidé d’expérimenter les solutions de recyclage des enrobés et de retraitement des chaussées en place, avec, entre autres, la route Yamoussoukro-Attiégouakro retraitée à l’émulsion de bitume avec apport de ciment et un revêtement en enduit superficiel (environ 20 km de long), et la route Akoupé-Kotobi-Bongouanou retraitée à l’émulsion de bitume avec apport de ciment (environ 58 km). En 2016, le thème abordé, « Infrastructures en Côte d’Ivoire : défis et opportunités », a permis au Centre de Promotion des Investissements en Côte d’Ivoire (CEPICI) de présenter les opportunités dans le domaine du BTP. La question de la durabilité des infrastructures routières a été traitée au cours des panels afin de réfléchir à comment améliorer la qualité des ouvrages livrés. En 2018, le thème « Penser l’aménagement du territoire en intégrant les réseaux intelligents » a permis de mettre en exergue les coûts exorbitants liés aux déplacements de réseaux dans les projets d’infrastructures en Côte d’Ivoire. Des initiatives ont été prises pour protéger les emprises de ces projets. Une étude de faisabilité a été récemment lancée en vue de la mise en place d’un portail de Système d’Information Géographique (SIG) – un guichet unique digital – pour les déclarations de travaux et les déclarations d’intention de commencement de travaux. Cette initiative est portée par le Ministère de la Transition Numérique et de la Digitalisation, en partenariat avec la Banque mondiale. Les retombées des éditions précédentes témoignent de l’efficacité du Salon des Infrastructures d’Abidjan à catalyser des innovations et à générer des opportunités pour les acteurs du secteur. J’encourage tous les acteurs de la chaîne de valeur du génie civil à venir massivement à ce salon, car il ne s’agit pas de craindre les technologies, mais de saisir les opportunités qu’elles offrent pour le développement du secteur.
Au terme de cette interview, je souhaite adresser mes vifs remerciements au président honoraire du GIBTP, Philippe Eponon, ainsi qu’au nouveau président, Lamine Koné, pour la confiance sans cesse renouvelée. Je remercie également tous les membres du comité scientifique pour leur engagement remarquable à nos côtés.
(AIP)
bsp/haa