Abidjan, 03 avr 2025 (AIP) – Le Bâtonnier de l’Ordre des avocats du barreau de Côte d’Ivoire, maître Florence Loan-Messan, a exhorté le jeudi 3 avril 2025 au Palais de justice du Plateau, lors de la cérémonie solennelle de prestation de serment des auditeurs de justice de l’École de magistrature, les magistrats à faire preuve d’une indépendance absolue face aux influences politiques.
Le Bâtonnier du barreau ivoirien a rappelé aux auditeurs de justice et futurs magistrats qu’ils ne sont pas au service d’un pouvoir, d’un parti ou d’une idéologie, mais bien les garants d’un équilibre essentiel empêchant la justice de devenir un instrument au profit des puissants.
« Cette exigence prend une résonance particulière à l’approche des élections générales en Côte d’Ivoire. Les périodes électorales agitent les passions, polarisent les discours et tentent parfois d’instrumentaliser la justice », a-t-elle souligné.
Dans ce contexte, maître Loan-Messan a mis en garde contre les tentatives de manipulation politique. « Certains voudraient vous réduire au rôle de figurants d’un théâtre politique, cherchant à vous utiliser pour légitimer des intérêts partisans. Résistez ! Rappelez-vous que l’histoire judiciaire est jalonnée de magistrats qui ont su dire non aux pressions du moment. La justice ne se rend pas sous l’urgence médiatique ni sous les injonctions des palais politiques. »
Maître Florence Loan-Messan a insisté sur les deux piliers fondamentaux de l’indépendance judiciaire, à savoir la rigueur juridique qui impose de fonder chaque décision sur la lettre et l’esprit de la loi, et le courage moral qui commande de rester sourd aux menaces comme aux flatteries.
« Qu’elles viennent des pouvoirs d’argent, des réseaux sociaux ou des cercles d’influence, la justice ne doit jamais se plier à l’opinion publique. Votre légitimité ne se mesure pas aux sondages, mais à votre fidélité au droit, à la Déclaration universelle des droits de l’homme, à notre Constitution et à votre serment », a-t-elle affirmé.
L’avocate a mis en garde contre les tentatives de brouiller les frontières entre les pouvoirs judiciaire, exécutif et législatif, rappelant que l’indépendance judiciaire peut parfois gêner.
« Vous serez scrutés, critiqués, parfois caricaturés, mais n’y voyez pas une faiblesse. C’est le prix de votre liberté. Une justice qui ne dérange jamais est une justice qui a renoncé à son âme », a-t-elle déclaré en conclusion, appelant les futurs magistrats à ne jamais décliner leurs compétences, renoncer à leurs devoirs ou sombrer dans l’autocensure.
Le président de la Cour, Gnamien Arsène Joseph, et l’Avocat général Kougnon Jean Claude ont appuyé ces conseils, insistant sur l’importance de l’intégrité et de l’impartialité dans l’exercice de la fonction judiciaire.
Au total, 54 auditeurs de justice issus de la promotion 2024, composés de 28 hommes et 22 femmes, ont prêté serment. Parmi eux, un militaire, un commissaire de police et deux auditeurs de justice venus de la République centrafricaine. Ces futurs magistrats suivront un stage pratique de 12 mois avant d’être officiellement intégrés dans la magistrature.
L’Institut national de formation judiciaire (INFJ), créé en 2005, est un établissement public national de formation professionnelle comprenant les écoles de magistrature, de greffes, du personnel pénitentiaire et du personnel de la protection judiciaire de l’enfance et de la jeunesse.
(AIP)
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