San Pedro, 18 avr 2025 (AIP) – La gare routière de San Pedro connaît une forte affluence de populations originaires de la région du Gbêkê et du District autonome de Yamoussoukro, qui s’y rendent à l’occasion de la fête de Pâques, pour célébrer « Paquinou », version culturelle de cette fête chrétienne propre au peuple Baoulé.
A la gare de San Pedro, des transporteurs individuels ainsi que Zouzou Yao Guillaume, agent d’exploitation chargé de la programmation de convois à la gare de l’Union des Transporteurs de Bouaké (UTB), ont indiqué que l’accroissement de la clientèle a débuté dès le lundi, en lien avec les préparatifs de la fête de Pâques.
La compagnie UTB, qui assure le transport direct entre San Pedro et Bouaké via Yamoussoukro, avait anticipé l’événement. Elle a réaménagé les horaires de cette ligne en débutant le service dès 5h30 jusqu’à 20h00, voire au-delà, contrairement aux jours ordinaires.
M. Zouzou a précisé que l’affluence exceptionnelle a commencé lundi avec huit convois de 64 places uniquement à destination de Bouaké, un chiffre jamais atteint en temps normal. Depuis lors, le nombre de convois quotidiens n’a cessé de croître, atteignant 19 convois le jeudi. Il a ajouté que le programme des autres destinations, telles que Man, Gagnoa, Daloa, Lakota et Divo, n’a pas été modifié.
En temps habituel, les itinéraires pour rejoindre Bouaké sont : San Pedro, Soubré, Gagnoa, Ouragahio, Sinfra, Yamoussoukro et Bouaké ou encore San Pedro, Issia, Sahoua, Sinfra, Yamoussoukro et Bouaké. Ces trajets sont plus longs, et le voyage durait environ 11 heures, en raison de la forte dégradation de la route sur plusieurs tronçons.
M. Zouzou a souligné que pour réduire la durée du trajet, la compagnie a opté pour un itinéraire alternatif : San Pedro – Sassandra – Guitry – Divo – échangeur de Toumodi – Yamoussoukro – Bouaké. Ce parcours est plus rapide grâce au bon état de la route côtière et de l’autoroute du Nord.
Plusieurs voyageurs venus des différentes villes et villages de la région, attendant patiemment leur départ, ont évoqué diverses raisons justifiant leur déplacement pour cette fête.
Pour Youkou Patrice, planteur et conseiller municipal à Tabou, l’occasion est idéale pour se rendre à Yamoussoukro afin de célébrer avec sa mère, ses frères et cousins, tout en tenant une réunion de famille pour se prodiguer mutuellement des conseils. Il s’agira également d’organiser des réunions de bilan des associations de développement du village et de définir de nouvelles perspectives.
Il a ajouté que le programme de cette année prévoit une grande rencontre de retrouvailles à Anouazin, dans la sous-préfecture de Didiévi, marquée par un festival culinaire visant à promouvoir les plats traditionnels de la région.

Quant à N’Guessan Konan, instituteur à Ladjikro, un village de la sous-préfecture de Grand-Bereby, en partance pour Bindèkouassikro, dans la commune de Bouaké, il a évoqué deux raisons pour son voyage : profiter des congés de Pâques pour célébrer avec sa grande famille, et saisir cette occasion de retrouvailles pour exprimer sa gratitude à toutes les personnes ayant contribué au bon déroulement des obsèques de sa sœur aînée, décédée en janvier et inhumée en février.
Les festivités seront également marquées par la cérémonie d’intronisation du chef de village de Bindèkouassikro, qui réunira tous les cadres.
Pour Aka Eléonore, qui se rend à Bouaké, il s’agit de prendre part à la cérémonie de dote de la fiancée de son frère, organisée à cette période afin de permettre à un maximum de membres de la famille d’y assister.
La région de San Pedro accueille une forte communauté Baoulé originaire du centre, installée dans plusieurs villages tels que Grobonoudan, Boignykro, Nonouan, Do Sakassou et Méné Centre, créés depuis 1972 pour reloger les populations déguerpies lors de la construction du barrage hydroélectrique de Kossou sur le fleuve Bandama.
Chaque année, durant la semaine de Pâques, de nombreux ressortissants de cette communauté retournent dans leur région d’origine pour partager des moments festifs et de retrouvailles appelés « Paquinou » consacrés également à des réunions de développement.
Face à cette grande mobilisation, Paquinou s’impose bien plus qu’une simple fête : elle est le symbole vivant d’un attachement profond aux racines, d’un besoin de cohésion familiale et communautaire, mais aussi d’une dynamique de développement portée par la culture et la tradition. Sur les routes de Côte d’Ivoire, les kilomètres s’effacent devant l’appel du village.
(AIP)
nbf/zaar
Reportage réalisé par N’Fohi Faustin